PANNEAU 10

Les femmes dans l’entrepreneuriat

Le chef d’entreprise est une cheffe !

L’École des Hautes Études Commerciales  (HEC) est créée en 1881. Elle n’accueille que des garçons. Cette école a pour objectif de former des dirigeants d’entreprise. Il faudra attendre 1970, pour qu’elle ouvre ses portes aux filles.

32,3% de dirigeantes d’entreprise, contre 67,7% de dirigeants d’entreprise en France en 2021.

Nous avons interrogé Laetitia Modeste,  cheffe d’entreprise dans la mode éthique, qui a fondé la marque “Laetitia Modeste Couture homme”,

repères

Les secteurs d’activités privilégiés par les femmes entrepreneures peuvent être décrits selon trois caractéristiques essentielles :

1- La dimension « féminine » de l’activité (esthétique,  mode,   soins  de la personne,  de  la famille, éducation…),
2- Les qualités requises plutôt féminines (sens de l’écoute, communication, imagination,       sens       du       détail…),
3- Les barrières peu élevées à l’entrée de la création (financières, compétences techniques…).

Les 3 secteurs qui comptent le plus de femmes :

1- L’habillement
2- L’action sociale
3- La santé

Le mécanisme est le même que pour la mixité des métiers.Les femmes gèrent des entreprises de plus petites tailles. Elles ont donc plus souvent que les hommes, des micro- entreprises sans salariés. Ainsi, le chiffre d’affaire des entreprises dirigées par les hommes est 2 fois supérieurs à celui des entreprises dirigées par des femmes. (sources : infogreffe).

Idées reçues

Les femmes n’ont rien à faire dans le monde des affaires car elles n’ont pas les capacités pour cela.

Il y a moins de femmes cheffes d’entreprise car elles n’ont pas envie de créer.

Une femme  cheffe d’entreprise est une femme sans vie de famille.

Débats

L’éthique au cœur de l’envie d’entreprendre

« J’ai créé une entreprise pour répondre à mes valeurs d’éthique tant dans le travail des matières que dans la fabrication des vêtements. J’ai fait de mon rêve mon travail, en créant cette entreprise. »

Son métier

« Un bac scientifique, une licence en ressources humaines, j’ai  voulu  me  réorienter  vers  quelque   chose   qui laissait parler la créativité. Alors, j’ai fait 3 ans d’études de modélisme série du vêtement à l’Académie Internationale de Coupe de Paris (AICP). Mon métier en plus de diriger une entreprise, c’est de rendre le dessin vivant, de produire un dessin en 3 dimensions en partenariat avec le styliste. Ce métier est reconnu comme métier d’art. »

Plus difficile d’entreprendre pour une femme

«  Il  n’y a  pas  un  entrepreneuriat au féminin.  Il y a seulement des femmes et des hommes qui entreprennent. Quand on est une jeune femme comme moi et que l’on souhaite créer une entreprise, alors on vous dit qu’il va être impossible de construire une famille. Il va donc falloir en faire deux fois plus. »

Rôle de votre entourage

« J’ai été soutenue par mes ami.es et mon conjoint. Mes parents au début de l’aventure avaient peur pour moi. Il n’y a pas dans ma famille de chef.fe d’entreprise. J’étais alors une extraterrestre car j’ai quitté un CDI pour créer mon entreprise. Je tiens à préciser que l’entourage est très important pour réussir, j’ai des ami.es chef.fes d’entreprises et plus précisément deux modèles de femmes, cheffe d’entreprise. Elles m’ont aidée dans le choix de mes études et accompagnée dans la création. Il est indispensable d’avoir cet entourage.»

Définition

L’entrepreneuriat désigne l’action d’entreprendre, de mener à bien un projet. Souvent utilisé dans le secteur des affaires, le terme entreprendre signifie créer une activité (économique) pour atteindre un objectif, répondre à un besoin. Le créateur représente l’entrepreneur, soit le porteur du projet.

Histoire

Dès les années 1920, des associations ou des clubs féminins vont se créer pour soutenir l’accès des femmes aux postes à responsabilités professionnelles. En France, nous pouvons citer Suzanne Noël (1878-1954) https://fr.wikipedia.org/wiki/Suzanne_Noël. Ces clubs ont pour objectif d’organiser des actions communes. Ils sont fréquentés par des femmes de classe moyenne et supérieure. A l’époque, les clubs n’étaient pas mixtes. Le Rotary club (fondé en 1905) et le Lions club (1917) refusent les femmes. Suite à une intervention pour attitude discriminatoire de la Cour suprême des Etats-Unis, ils deviendront mixte en 1987. Le militantisme spécifique des femmes chef.fes d’entreprise prend forme avec Yvonne Foinant (1892-1990) https://fr.wikipedia.org/wiki/Yvonne-Edmond_Foinant

A la libération, elle fonde l’association Femmes chefs d’entreprise qui existe toujours. https://www.fcefrance.com/. De nombreux clubs de femmes existent aujourd’hui afin de promouvoir les femmes à la tête d’entreprise. Ils ont pour objectif de favoriser l’échange, la mise en réseau mais aussi de proposer des pratiques et conceptions de l’entreprise qui se veulent alternatives.

Aujourd’hui

Lors d’une journée d’études dans le département du Gard mais également à l’occasion d’animation de tables rondes, j’ai rencontré différents réseaux de femmes cheffes d’entreprises. Je restitue ici les redondances de leurs propos. Elles témoignent généralement de la difficulté de produire un discours sur soi. « Le discours sur soi demande un apprentissage. Or les femmes ont moins l’habitude de parler d’elles et de se mettre en valeur. Elles doivent acquérir cette confiance. Il y a une question d’estime de soi. Quand les personnes réalisent un bilan, on les amène à rencontrer d’autres personnes. C’est une richesse. » Je leurs avais demandé pourquoi les femmes étaient peu nombreuses à se lancer.

Les femmes entrepreneures disent avoir moins confiance en elles que les hommes à l’étape de pré-démarrage de l’entreprise. L’envie de créer est bien là, d’ailleurs les femmes seraient plus imaginatives que les hommes.

L’explication se trouve dans les processus de socialisation. La socialisation est un processus par lequel l’enfant et l’individu tout au long de sa vie est amené à intérioriser des codes sociaux relatifs au féminin et au masculin. 

Ces différences de traitement entre les garçons et les filles se font de manière inconsciente et ne sont donc pas volontaires.

C’est donc une construction sociale. Comme le disait Simone de Beauvoir : on ne nait pas femme, on le devient. Tout est une question d’apprentissage.

SIMONE DE BEAUVOIR

Elles sont réticentes quand il s’agit de se promouvoir, de communiquer sans complexe leurs performances. Elles sont très humbles et ont peur d’être prétentieuses.

Comme le dit l’historienne Michelle Perrot « les femmes sont silencieuses ».

Même si l’irruption de paroles de femmes a émergé depuis le dernier demi-siècle, il reste des zones muettes. Le silence est l’ordinaire des femmes, il convient à leur position. La pudeur est la vertu des femmes, le silence son honneur.

Cette modestie féminine serait encouragée dès l’enfance. D’après elle, la reconnaissance est « sexuée » dès la naissance et perdure toute la vie. Par exemple, une petite fille sera félicitée pour son comportement mettant en pratique le « don aux autres, comme le service, l’aide, l’écoute et la gentillesse » tandis qu’un garçon sera encouragé à développer des qualités individuelles comme « la ténacité, le courage, l’ambition, le labeur, la combativité ». Donc, une fois rendue sur le marché du travail, les femmes se cachent derrière leur équipe ou minimisent leur succès pour éviter de paraître arrogantes, menaçantes… ou ambitieuses

Entreprendre c’est être auteure de soi et donc passer du silence à l’affirmation de soi et rompre avec le déterminisme de sa socialisation.

L’importance de l’entourage est capitale

Elles ont besoin de se retrouver dans des réseaux solidaires pour se soutenir. Les statistiques démontrent qu’elles ont plus fréquemment que les hommes (55%) un père chef d’entreprise, et encore plus souvent au moins un frère ou une sœur dans le même cas. Leur origine sociale apparaît aussi plus diversifiée. D’où l’importance d’avoir des modèles de créateurs d’entreprises dans son environnement social. L’habileté à développer leur réseau de contacts est quelque chose que les femmes considèrent comme un facteur critique de succès qu’il faut apprendre à maitriser et à aimer faire.

Bibliographie

Bard C. (sous la direction de) avec la collaboration de Sylvie Chaperon, Dictionnaire des féministes France XVIIIe -XXIe siècle, PUF, 2017, p.510-517.

Delorme-Hoechstetter M., Louli Sanua, Aux origines d’HEC Jeunes Filles, dans Travail, genre et sociétés 2000/2 (N° 4), p. 77-91. https://fr.wikipedia.org/wiki/Haut_enseignement_commercial_pour_les_jeunes_filles

Rabier M. Le ciel de plomb des organisations patronales, dans Travail, genre et sociétés 2016/1 (n° 35), Travail, genre et sociétés, 2016/1 n°35, p.87-105 https://www.cairn.info/revue-travail-genre-et-societes-2016-1-page-87.htm

Sitographie

Une étude auprès de toutes les entreprises en France, réalisée par Infogreffe :

https://www.infogreffe.fr/documents/20126/0/Infographie_8mars2022_Infogreffe.pdf

Paris, le 8 mars 2022 – A l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, Infogreffe a dévoilé une nouvelle étude exclusive sur les femmes et l’entrepreneuriat en France. L’analyse des données issues de plus de deux millions et demi d’entreprises enregistrées sur Infogreffe permet d’observer une stabilisation de la situation des femmes dans le monde entrepreneurial, aujourd’hui largement dominé par les hommes.

Filmographie

Numéro Une (2017)

Numéro Une est avant tout le récit de la solitude d’une femme de pouvoir. Brillante et volontaire, Emmanuelle Blachey est cadre supérieur du géant français de l’énergie. Elle est approchée par un réseau de femmes d’influence qui se propose de l’aider à prendre la tête d’une entreprise du CAC 40, géant de la distribution de l’eau. Elle serait la première femme à occuper une telle fonction, mais c’est sans compter le fameux machisme masculin …

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